Les Farfadets - Le Musical Comédie

Se rassembler autour de la ruralité

La Compagnie Les Farfadets existe et évolue depuis une quinzaine d'années dans le pays Charlieu/ Belmont-de-la-Loire (42), ainsi que dans la région Auvergne Rhône-Alpes. Elle porte comme principale ligne de création la mise en valeur du patrimoine par l'art vivant. Elle est la fondatrice du festival "Paroles paysannes", qui entre justement dans cet objectif : créer des spectacles mettant en scène l'histoire et la vie quotidienne du monde agricole et paysan, autour d'un lieu : le Grand Couvert de Saint Hilaire sous Charlieu. Pour sa 15ème édition, Alexandre Dufaux, metteur en scène, propose de centrer la soirée autour du thème des comédies musicales. Animations, jeux avec les spectateurices, chants à n'en plus pouvoir et chorégraphies sympathiques, le ton joyeux est donné avec l'installation dans la fameuse grange du Grand Couvert, où se tient le spectacle "Musical Comédie". Entre les chansons de tous horizons, les applaudissements à répétition, et un fil rouge à rallonge, que reste-t-il de cette soirée à la campagne ? Et surtout : pourquoi ça marche ?

Le spectacle repose sur un fil rouge plus ou moins bancal, pourtant fondé sur une belle idée : mettre au cœur du récit le lieu même où le spectacle a lieu, encrant à nouveau cette création dans la ligne de conduite de la compagnie. L'enjeu de la fermeture du Grand Couvert, le combat mené par les personnages pour aider Laurence, la tenancière, les relations amoureuses qui se tissent, l'histoire aurait pu être belle. Et elle l'est, mais elle s'éclipse finalement assez vite au milieu d'un torrent de chansons, pour enchaîner sur une seconde partie qui fait chuter le rythme endiablé du show. S'ensuit donc, après le sauvetage expédié du Grand Couvert, une comédie à la Feydeau, mais sexiste à souhait, où Laurence, pourtant tenace et résiliente dans la première partie, est réduite à son statut d'épouse, ridiculisée par son mari (qui la trompe, rappelons-le, puisque le sujet est tourné en dérision par un quiproquo). Alors que la première partie misait sur l'aspect comédie musicale pour raconter son histoire, la seconde change du tout au tout pour devenir bavarde, pour un résultat au goût un peu amer.

Et pourtant, ça marche.

Le public est au rendez-vous, continue d'applaudir chaque performance chantée, et se lance dans une ovation une fois le glas enfin sonné.

Qu'ont donc Les Farfadets qui rend leur spectacle si attachant malgré ses défauts et ses maladresses ?

Il faut s'éloigner des attentes parfois un brin élitistes que l'on peut avoir. C'est une parenthèse que je sais purement personnelle, mais lorsque l'on élargit son expérience de spectateurice, on nourrit souvent une plus grande exigence de qualité, qui répond bien sûr à certains critères objectifs, mais qui repose tout de même largement sur un ressenti subjectif.

Ce "Musical Comédie" a tout pour plaire à un large public. Tout est fait pour proposer une atmosphère conviviale, presque familiale et familière, où le partage tisse un lien de confiance et de connivence entre les comédien.nes et les spectateurices. Le ton est donné dès le début de la soirée, alors que deux Monsieur Loyal prennent le micro pour nous emmener dans un voyage (in)temporel à la rencontre de chansons (presque) connues de toustes. De "Mamma Mia" aux "Amants de la Bastille", toutes les références se mélangent pour former un méli-mélo intergénérationnelle, et c'est aussi ce qui se passe pendant le spectacle sous le toit de la grange.

Ce qui fait du nouveau spectacle des Farfadets un succès, c'est sans doute sa dimension "show". Costumes splendides, lumières colorées, décors de cabarets, il y a chez Alexandre Dufaux une vraie volonté de recréer des tableaux dignes des grandes comédies musicales qu'ils incarnent, tout en gardant une certaine modestie fort touchante. En faisant appel à des figurant.es de la région, et en confiant deux rôles principaux à de jeunes comédiens, il crée un écho avec les publics de tout âge. Et mine de rien, la tenue de ce genre d'évènements semble primordiale pour continuer de faire vibrer les campagnes, de leur offrir une dynamique pop, culturelle.

La deuxième partie reste pour moi un échec dans mon expérience de spectatrice, et l'on peut regretter que l'époustouflant travestissement d'Alexandre Dufaux ne soit pas mieux exploité (quelle voix !). Mais l'ensemble du show reflète une volonté admirable de mettre en avant la ruralité et de faire cabaret ensemble.