Pour faire le lien avec le voguing qui apparaissait et prenait de l’ampleur à New York tout au long du XXème siècle, en France le mouvement ne se développe que depuis 2010. Mais c’est une implantation majeure puisque Paris devient même capitale européenne du voguing.
« A Paris et à New York c’est différent. Ici, ce n’est pas normal d’être en communauté, ou du moins, c’est normal d’être en communauté mais loin du centre, en banlieue, dans la cité. Donc le fait d’avoir une communauté noire dans Paris qui s’assume, et de surcroît, une communauté homosexuelle et transgenre, c’est très fort. »
– Lasseindra Ninja, pionnière du voguing en France
Les contemporain.es : un essor multiforme de la culture queer
Nouveaux artistes, nouveaux discours
Les performances des drag queens, king et autres créatures s’inscrivent dans la continuité des show underground du XXème siècle. Ce sont des spectacles qui investissent de nombreux lieux, les cabarets mais aussi les bars, clubs, et théâtre. A Lyon, le Théâtre de la Croix-Rousse a accueilli « Le Cabaret de Madame Arthur », création proposée au Off d’Avignon par la troupe de Madame Arthur, un cabaret-club de Pigalle. Créé en 1946, il a rouvert ses portes il y a quelques années et est désormais une référence artistique pour la jeunesse parisienne.
La représentation de l’homosexualité chez les artistes émergents est une manière de se réapproprier une histoire, une culture, des valeurs : « faire du théâtre sur une mémoire qui est la nôtre » (Collectif Fléau social). On retrouve dans les spectacles une volonté de dire, eux aussi, leur non-dits, avec un regard plus actuel forcément. Coming-out, transidentité, questions de genre, violence – parce qu’elle existe toujours.
Le rôle des théâtres pour représenter et accueillir l’inclusivité
Beaucoup de scènes plus ou moins majeures se développent un peu partout en France, prêtes à accueillir les artistes queers émergents. Pour ne citer qu’eux :
- le Fotomat à Clermont-Ferrand où défilent de nombreux spectacles drag ;
- le Who’s bar à Paris
- le Cabaret du Prisme également à Paris
- le La Voir au Public à Lyon, qui a accueilli en 2023 le spectacle Closet – Ce qu’on n’a pas pu dire (Burger Queer au moment de sa représentation*), dans lequel deux comédiens racontaient leur coming-out homosexuel.
A Lyon également, le Théâtre des Clochards Célestes est un véritable tremplin pour les jeunes artistes en tout genre, d’autant qu’il est en collaboration avec le Théâtre de la Croix-Rousse, l’une des scènes majeures de la ville. Ces deux théâtres sont d’ailleurs lieux d’accueil pour des festivals à thématiques inclusives : Le Festival Arts et Création Trans au Théâtre des Clochards Célestes ; le Festiv.iel au Théâtre de la Croix-Rousse (plus d’infos sur les sites respectifs des théâtres, à retrouver ci-dessous).
« Être le théâtre de toustes grâce à une programmation diverse et inclusive :
Une forte attention est portée à la manière de proposer un théâtre plus inclusif, en accompagnant les projets et les récits de celles et ceux qui sont moins vu·e·s et moins entendu·e·s dans la société actuelle. Cette volonté se traduit tant par les sujets abordés dans la programmation que par l’identité des artistes accueilli·e·s. »
Courtney Geraghty, directrice du Théâtre de la Croix-Rousse à Lyon
Zoom sur L’Homosexualité, ce douloureux problème
L’Homosexualité, ce douloureux problème, c’est d’abord une émission, celle de Ménie Grégoire, diffusée à la radio le 10 mars 1971, durant laquelle des activistes s’insurgent et appellent les invités à rejoindre le FHAR, le Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire. Cette émission est le point de départ du collectif Fléau social. La troupe s’est fondée autour d’une envie commune, comme en témoigne Mikael, l’un.e des artistes : « J’ai compris le besoin brûlant de former des histoires où se sentir représenté ne doit pas être une option ou un petit bonheur la chance. »
L'enjeu de la création, c'est son message : « faire du théâtre sur une mémoire qui est la nôtre ». La mise en scène rend hommage à un passé queer qu'on ne connaît pas ou peu, car malheureusement occulté par les années sida qui ont suivi la dissolution du FHAR. Ces années provoquent une rupture dans la passation de flambeau. La volonté du collectif est de réhabiliter cette mémoire, car le combat de ces personnages est toujours en résonance avec les combats queer actuels. Ils cherchent donc à « s'emparer de leur liberté » pour la mettre en scène et revaloriser cette période historique. Il s'agit de relever le défi de faire communauté avec d'autres générations, des ancêtres qui relèvent d'une autre filiation, puisque, comme ils le disent plusieurs fois au cours de leur spectacle, « nous ne nous reproduisons pas ! ».
C'est un message d'espoir et d'union, mais aussi de vulnérabilité et de révolution qui porté par le spectacle et le collectif.
« Il y a si peu de différences entre ce qu’on a vécu nous et ce qui se vit aujourd’hui dans les luttes actuelles. Un même espoir diffus, une semblable fulgurance, un tremblement d’émancipation similaire à ce qu’a été le mien et sûrement, sûrement, parfois, les mêmes découragements... C’est bien la preuve que même si les groupes meurent et que les temps changent, la lutte, elle, continue. »
On arrive à la fin de ce travail de recherches en trois parties :)
Il y aurait toujours plus de choses à dire sur le sujet, n'hésitez pas à être curieux.ses.
Pour commencer, quelques articles écrits par mes soins :
Ajouter un commentaire
Commentaires