La matière plastique est partout, le plastique a tout infiltré, nos paysages et nos corps, partout dans le monde ; dans l’air que l’on respire, dans tous les objets que nous utilisons. Face à ce constat, le chorégraphe et danseur Tidiani N’Diaye crée une pièce qui joue un peu comme un révélateur et un médiateur. Sans chercher à émettre de jugement ou à nier les enjeux politiques de la situation, il s’agit pour lui de montrer ce que provoque sur et en nous la cohabitation avec cette matière, en tentant parfois même de sublimer cette étrange situation. Mer plastique est une pièce chorégraphique pour cinq danseurs et la création d’un univers chorégraphique en réalité virtuelle immersive dans un monde devenu plastique lui-même.
Lieu : Les Subsistances, Lyon
Direction artistique et chorégraphie : Tidiani N’Diaye
Danse : Eric Nebié, Kaïsha Irma Essiane, Flora Schipper, Souleymane Sanogo, Andréa Semo
Scénographie et costumes : Silvia Romanelli
Lumière et direction technique : Hugo Cahn
Une danse hypnotique des corps et des couleurs
L'entrée dans la salle est déjà une rencontre avec le spectacle : dans l'air, un brouillard de lumière rouge ; face à nous, une scène tapissée de plastiques multicolores. Un trop plein déjà porteur de sens. Les rumeurs du public qui s'installe renforcent une impression de chaleur pesante. Des corps que l'on devine allongés au milieu du plastique se meuvent discrètement. A peine commencé, le titre du spectacle prend toute sa signification : c'est bien une Mer plastique qui prend vie petit à petit face à nous. Les corps émergent, se détachent de leur univers de plastique tout en continuant d'évoluer en son sein. La chorégraphie commence.
Nous sommes immédiatement happés par ces cinq corps étrangers, étranges, parfois difformes. Cinq corps qui découvrent leur univers, jouent avec le plastique, chacun à leur manière. Le plastique devient tour à tour source de jeu, de déguisement, ressource intarissable, inlassablement gaspillée. Cinq corps qui deviennent individus, qui se suivent et se lancent dans une chorégraphie de groupe, au fur et à mesure d'une musique convulsive et entraînante. Le spectacle nous raconte mille vies de corps en harmonie puis en conflit, où le plastique devient tour à tour refuge, arme, lieu de vie, de fusion, de lutte. C'est une lutte d'abord contre l'autre puis contre la mer elle-même : la scène devient alors lieu de rejet, ou du moins d'une tentative de rejet de ce plastique encombrant. Mais il y en a toujours plus.
Le spectacle met en mouvement une lutte de vie et de mort sublimée par une chorégraphie hypnotique, rythmée par un jeu de musique et de lumières qui embrasse les mouvements et souligne en parallèle les moments de relâche. L'ensemble pose la question de notre monde en surconsommation constante. Le gaspillage, la pollution, tout ce qui tend à faire de nous des êtres de plastique : les danseurs ne font plus qu'un avec lui. C'est une mise en scène de l'humanité dans toute sa fragilité mais aussi dans toute sa puissance créatrice.
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Commentaires
c’est magnifiquement dit !! superbe retranscription de ce merveilleux spectacle <3