Entourés d’un pianiste et d’un batteur, Samuel Hercule et Métilde Weyergans remettent le ciné-spectacle au goût du jour, interprétant sur scène non seulement les dialogues du film projeté derrière eux mais aussi l’ensemble des bruitages. Sur scène et sur la toile, ils livrent une version toute contemporaine du conte Hansel et Gretel : la triste histoire originelle des enfants abandonné·es en pleine forêt laisse place à celle d’un couple de magiciens précarisés par leur maigre retraite, et hébergés par leur fils lui-même au chômage. Une charge que Barbara, la nouvelle amoureuse de Jacob, juge vite trop encombrante, jusqu’à le convaincre d’abandonner les deux anciens dans les sous-bois. À l’heure où la crise économique ronge le tissu social et où la solidarité entre les générations fait débat, Hansel et Gretel offre un cocktail entre parents et enfants détonnant, à découvrir en famille, bien entendu.
Adaptation, réalisation, mise en scène : Samuel Hercule et Métilde Weyergans
Musique originale : Timothée Jolly
Avec sur scène : Samuel Hercule et Métilde Weyergans (voix et bruitages) / Timothée Jolly et Florie Perroud (musique)
A l'écran : Michel Crémadès (Hansel), Manuela Gourary (Gretel), Samuel Hercule (Jacob), Métilde Weyergans (Barbara)
De la féerie plein les yeux
Quel plaisir de retrouver les artistes de la Cordonnerie qui avaient tant fait vibrer le Théâtre de la Croix-Rousse il y a deux ans, lors de l’époustouflant Ne pas finir comme Roméo et Juliette ! On s’attend forcément, même sans le vouloir, à retrouver un certain émerveillement pour ce nouveau spectacle, à se laisser subjuguer par la performance que vont nous offrir Métilde Weyergans, Samuel Hercule et leurs partenaires musiciens, Timothée Jolly et Florie Perroud . On cherche à s’en mettre plein la vue, et l’on s’installe sur son siège avec une impatience d’enfant. Que nous réserve la Cordonnerie avec son Hansel et Gretel ?
Tout d’abord, bien sûr, la performance tant attendue, le mélange des genres – cinéma, théâtre, musique – et la palette de savoir-faire des quatre artistes. La maîtrise technique dont chacun d’entre eux témoigne crée sur scène une véritable chorégraphie. On a presque l’impression d’être les témoins voyeuristes de ce qui se passe derrière la caméra. Métilde Weyergans et Samuel Hercule proposent une nouvelle fois de mettre à nu le cinéma, de le décortiquer pour en extraire chaque son, ne laissant que l’image pour support fixe. Tout le reste – les dialogues, les sons, la musique – est dédié à l’espace scénique. Cette exhibition des artifices du cinéma a pour objectif de rendre le cinéma plus vivant, de faire de l’objet filmique, par essence immuable, un objet changeant, soumis à l’éphémérité du théâtre : on a ainsi le sentiment d’assister à quelque chose d’unique, une parenthèse fictionnelle soumise à un instant T.
Pour ce nouveau spectacle, les artistes sur scène se mettent au service de ce qui se passe à l’écran. Tout est fait pour recréer l’univers et l’esthétique du conte. La reprise de l’histoire de Hansel et Gretel intensifie le mélange des genres proposées par la Cordonnerie. En effet, il s’agit de l’adaptation d’une œuvre littéraire, portée sur grand écran, sublimée par la scène du théâtre. S’ajoute également la musique, omniprésente, qui a autant à raconter que le texte – d’ailleurs peu présent – et les images. Le résultat : une fable en toute simplicité, drôle, attachante, avec un jeu et une technique en toute humilité.
C’est aussi une belle métaphore de la société – c’est souvent ce que recherchent Métilde Weyergans et Samuel Hercule : créer un spectacle narratif en écho avec des problématiques sociales. Ici, plusieurs questions sont mises en avant, notamment celle de la précarité – l’introduction sur un entretien Pôle emploi, la caravane, la nécessité de manger, … Se mêle à ces éléments les relations parfois difficiles entre parents et enfants – tous adultes. Quels liens restent-ils entre deux générations ? Quand peut-on dire que les parents ont « fait leur temps » ? Toutes ces questions sont abordées à travers la légèreté du conte et l’émerveillement que celui-ci nous laisse. On accepte, devant son spectacle, de retrouver un peu de magie, et peut-être ainsi de retourner à l’essentiel.
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